L’élaboration d’un plan de soins infirmiers pour la constipation nécessite de bien comprendre cette affection. Ce guide explique comment évaluer le patient, poser un diagnostic infirmier, planifier les soins, définir des objectifs et mettre en place des interventions adaptées pour améliorer le confort et la santé intestinale du patient.
Qu’est-ce que la constipation ?
La constipation se caractérise par des selles moins fréquentes que la normale, difficiles ou incomplètes à évacuer. C’est un symptôme courant qui touche de nombreuses personnes, en particulier les adultes de plus de 60 ans, et contribue à de fréquentes hospitalisations.
La constipation peut avoir plusieurs causes :
- Facteurs mécaniques (obstruction intestinale, troubles digestifs)
- Médicaments (analgésiques, anticholinergiques, suppléments de fer…)
- Comorbidités (diabète, maladies neurologiques, hypothyroïdie…)
- Dysfonctionnements sensorimoteurs rectaux
Si elle n’est pas prise en charge, la constipation peut évoluer vers des complications sérieuses, comme :
- Impaction fécale
- Incontinence fécale
- Hémorroïdes
- Prolapsus rectal
- Fissure anale
Diagnostic infirmier
Après une évaluation complète, l’infirmière établit des diagnostics infirmiers pour répondre aux problèmes liés à la constipation. Ces diagnostics permettent d’organiser les soins et de hiérarchiser les besoins du patient, mais leur utilisation peut varier selon le contexte clinique. Le jugement et l’expertise de l’infirmière restent essentiels pour adapter le plan de soins à chaque situation.
Exemples de diagnostics fréquents :
- Constipation liée à un apport insuffisant en liquides : selles rares, dures et effort ressenti lors de la défécation.
- Constipation liée à une activité physique insuffisante : douleurs abdominales, ballonnements, difficulté à aller à la selle.
- Constipation liée à un apport insuffisant en fibres alimentaires : selles rares et dures, gêne rapportée par le patient.
Objectifs et résultats attendus
Définir des objectifs précis est essentiel pour un plan de soins efficace. Ils visent à améliorer le transit intestinal et à soulager les symptômes tels que les douleurs abdominales et les ballonnements.
Exemples d’objectifs :
- Dans les 4 heures suivant l’intervention, le patient identifiera les mesures pour prévenir ou traiter la constipation.
- Dans les 4 heures, le patient ou son soignant sera capable de mettre en place des actions pour éviter la réapparition de la constipation.
- Dans les 8 heures, le patient exprimera verbalement le soulagement de l’inconfort lié à la constipation.
- Dans les 12 heures, le patient maintiendra un transit intestinal régulier, avec des selles molles et moulées, à une fréquence considérée comme normale par le patient.
Interventions infirmières et conduite à tenir
Les interventions infirmières pour la constipation visent à rétablir un transit intestinal normal, soulager les symptômes et prévenir les complications. Elles reposent sur une approche globale, combinant modifications du mode de vie, éducation du patient et, si nécessaire, traitements médicamenteux.
1. Éducation et conseils diététiques
- Augmenter l’apport en fibres alimentaires : encourager la consommation de fruits, légumes, céréales complètes et légumineuses pour favoriser le transit intestinal.
- Augmenter l’hydratation : recommander une consommation adéquate de liquides, principalement de l’eau, pour ramollir les selles.
- Éviter les aliments constipants : limiter les produits laitiers en excès, les aliments riches en graisses saturées et les aliments transformés.
2. Encouragement à l’activité physique
- Promouvoir l’exercice régulier : encourager la marche ou d’autres formes d’activité physique adaptées pour stimuler la motilité intestinale.
- Éviter l’immobilité prolongée : chez les patients alités ou peu mobiles, mettre en place des programmes d’exercices doux pour prévenir la constipation liée à l’inactivité.
3. Éducation à la régularité des habitudes intestinales
- Établir une routine : encourager le patient à répondre à l’envie de déféquer sans délai et à établir des horaires réguliers pour aller aux toilettes.
- Créer un environnement propice : s’assurer que le patient dispose d’un environnement confortable et privé pour favoriser la défécation.
4. Traitements médicamenteux
- Laxatifs : administrer des laxatifs doux, tels que le lactulose ou le polyéthylène glycol, selon les prescriptions médicales.
- Suppositoires ou lavements : en cas de constipation sévère ou d’impaction fécale, envisager l’utilisation de suppositoires ou de lavements, sous supervision médicale.
5. Suivi et évaluation continue
- Surveiller les effets secondaires : observer les signes de déshydratation, de déséquilibre électrolytique ou d’effets indésirables liés aux médicaments.
- Adapter les interventions : ajuster les stratégies en fonction de la réponse du patient et de l’évolution de son état.
Évaluation infirmière
L’évaluation infirmière de la constipation repose sur une approche systématique pour identifier les causes, évaluer la gravité et déterminer les interventions appropriées.
1. Anamnèse et entretien avec le patient
- Fréquence et caractéristiques des selles : interroger le patient sur la fréquence, la consistance, la couleur et la présence de douleurs lors de la défécation.
- Habitudes alimentaires et hydriques : recueillir des informations sur l’alimentation, l’apport en fibres et en liquides, ainsi que les habitudes de repas.
- Historique médical : identifier les antécédents médicaux, les médicaments en cours, les interventions chirurgicales ou les maladies chroniques pouvant influencer le transit intestinal.
2. Examen physique
- Inspection abdominale : rechercher des signes de distension, de masses ou de douleurs abdominales.
- Palpation : évaluer la présence de masses fécales ou de zones douloureuses.
- Auscultation : écouter les bruits intestinaux pour détecter une hypo ou hyperactivité intestinale.
3. Évaluation des facteurs contributifs
- Médicaments : examiner les prescriptions médicamenteuses pour identifier les médicaments pouvant induire la constipation (par exemple, opioïdes, anticholinergiques).
- Mode de vie : évaluer le niveau d’activité physique, les habitudes alimentaires et les facteurs psychosociaux pouvant influencer le transit intestinal.
- Comorbidités : considérer les conditions médicales sous-jacentes, telles que le diabète, les maladies neurologiques ou les troubles endocriniens.
4. Utilisation d’outils d’évaluation standardisés
- Échelle de Bristol : utiliser cette échelle pour évaluer la consistance des selles et aider à déterminer la gravité de la constipation.
- Échelles de douleur : évaluer l’intensité de la douleur abdominale ou rectale associée à la constipation.
5. Planification des soins
- Identification des priorités : établir les priorités de soins en fonction de l’évaluation, telles que le soulagement de la douleur, l’amélioration du transit intestinal ou l’éducation du patient.
- Objectifs spécifiques : définir des objectifs mesurables et réalisables, comme l’amélioration de la fréquence des selles ou l’éducation du patient sur les habitudes intestinales saines.
Conclusion
La constipation est un problème fréquent en pratique infirmière, mais elle ne doit jamais être sous-estimée. Bien qu’elle puisse paraître bénigne, elle peut entraîner des complications sérieuses si elle n’est pas prise en charge rapidement et efficacement. Le rôle de l’infirmière est essentiel pour évaluer les habitudes de vie du patient, identifier les causes possibles, instaurer des interventions adaptées et accompagner le patient dans la mise en place de stratégies préventives.
Une approche globale, combinant éducation, soutien nutritionnel, encouragement à l’activité physique et, lorsque nécessaire, traitement médicamenteux, permet non seulement de soulager les symptômes, mais aussi d’améliorer la qualité de vie du patient. En mettant l’accent sur la prévention et l’autonomie, l’infirmière contribue à réduire les risques de récidives et à promouvoir un meilleur confort digestif au quotidien.
Ainsi, la prise en charge de la constipation ne se limite pas au traitement des symptômes, mais vise à offrir au patient une compréhension claire de son état, des outils pratiques pour y faire face et un accompagnement personnalisé pour favoriser son bien-être global.