Dans cet article, nous vous expliquons le plan de soins infirmiers et la conduite à tenir pour une patiente ayant subi une hystérectomie abdominale totale avec ablation des trompes et des ovaires (TAHBSO). Vous découvrirez tout ce qu’il faut savoir sur l’évaluation, les interventions, les objectifs et les diagnostics infirmiers spécifiques à cette chirurgie. Ce guide couvre les soins essentiels à prodiguer après une hystérectomie pour garantir une récupération optimale et sécurisée.
I. Qu’est-ce qu’une hystérectomie ?
L’hystérectomie est l’ablation chirurgicale de l’utérus. Elle peut être réalisée pour traiter un cancer, des fibromes, l’endométriose, des saignements graves ou des infections pelviennes.
- Sous-total (partiel) : seule la partie supérieure de l’utérus est retirée, le col restant en place.
- Totale : ablation de l’utérus et du col.
- Totale avec salpingo-ovariectomie bilatérale (TAHBSO) : ablation de l’utérus, du col, des trompes et des ovaires. Cette intervention est fréquente pour les cancers invasifs et certaines affections graves. Le retrait des ovaires entraîne une ménopause immédiate.
D’autres approches, comme l’hystérectomie vaginale ou assistée par laparoscopie (LAVH), sont moins invasives et permettent une récupération plus rapide, mais ne conviennent pas si le diagnostic est incertain.
Dans certains cas de cancer avancé, une exentération pelvienne totale (TPE) peut être nécessaire. Cette chirurgie très complexe inclut l’ablation de l’utérus, des ovaires, de la vessie et parfois du rectum, avec création éventuelle d’une colostomie ou d’une dérivation urinaire. Ces patientes nécessitent des soins intensifs après l’opération.
II. Priorités des soins infirmiers après une hystérectomie totale avec salpingo-ovariectomie bilatérale (TAHBSO)
1. Gestion de la douleur
La douleur est fréquente après une TAHBSO. Un contrôle efficace de la douleur est essentiel pour le confort de la patiente et pour favoriser une mobilisation précoce et une récupération rapide.
2. Soins de la plaie et prévention des infections
Surveiller le site opératoire pour détecter rougeurs, gonflements ou écoulements. Des soins appropriés aident à prévenir les infections et autres complications postopératoires.
3. Prévention de la thrombose veineuse profonde (TVP)
Les patientes présentent un risque accru de caillots sanguins dans les jambes. Encourager la mobilisation précoce, les exercices des jambes et, si prescrit, l’utilisation d’anticoagulants prophylactiques.
4. Fonction urinaire et intestinale
Surveiller la miction et le transit intestinal. Prévenir la constipation et gérer les difficultés urinaires pour améliorer le confort et la récupération.
5. Bien-être émotionnel
Apporter un soutien émotionnel, répondre aux inquiétudes et orienter la patiente vers des ressources ou services de conseil si nécessaire.
6. Fonction respiratoire
Encourager la respiration profonde et la mobilisation pour prévenir la pneumonie ou l’atélectasie.
7. Suivi hormonal
L’ablation des ovaires peut provoquer un déséquilibre hormonal. Surveiller les symptômes et informer la patiente sur les options de traitement hormonal substitutif, si indiqué.
III. Évaluation infirmière après une hystérectomie (TAHBSO)
L’évaluation doit porter sur les données subjectives (ce que la patiente exprime) et objectives (ce que l’on observe).
1. Points à surveiller :
- Préoccupations émotionnelles : inquiétudes sur les résultats de la chirurgie, peur du rejet par le conjoint ou la famille, retrait social, signes de dépression.
- Fonction urinaire : sensation de vessie pleine, envies fréquentes et urgentes, petites mictions, absence de jet urinaire, incontinence par regorgement, distension vésicale.
- Compréhension et adhésion : demandes d’informations, croyances erronées, mauvaise application des consignes entraînant des complications évitables.
2. Facteurs liés à la chirurgie et au contexte :
- Impact psychologique : inquiétudes liées à la perte de fertilité, au changement de l’image corporelle, à la sexualité, ou à des convictions religieuses.
- Facteurs physiques :
- Traumatisme chirurgical (manipulations, œdème, hématome).
- Complications circulatoires (hypovolémie, stase veineuse, congestion pelvienne, inflammation postopératoire).
- Risques liés à la position opératoire (pression sur les nerfs ou vaisseaux).
- Changements anatomiques (canal vaginal raccourci, baisse des hormones, baisse de libido, dyspareunie).
- Douleur abdominale ou périnéale.
- Transit perturbé par la chirurgie et la manipulation intestinale.
- Facteurs cognitifs : manque d’informations, mauvaise compréhension, absence de rappel ou de sources fiables.
IV. Diagnostic infirmier après une hystérectomie (TAHBSO)
Après l’évaluation, l’infirmière formule des diagnostics infirmiers afin d’identifier les problèmes réels ou potentiels liés à la chirurgie.
Ces diagnostics servent de cadre pour organiser les soins, mais dans la pratique clinique, c’est surtout le jugement et l’expertise de l’infirmière qui permettent d’adapter le plan de soins aux besoins spécifiques de chaque patiente.
L’objectif est donc de répondre aux préoccupations physiques, psychologiques et sociales de la patiente et d’assurer une prise en charge personnalisée.
V. Objectifs infirmiers et résultats attendus
La patiente devrait être capable de :
- Exprimer ses préoccupations et utiliser des stratégies adaptées pour mieux les gérer.
- Accepter son image corporelle et s’adapter aux changements liés à l’hystérectomie.
- Vider sa vessie régulièrement et complètement sans complications urinaires.
- Maintenir une perfusion sanguine adéquate, visible par des signes vitaux stables, des pouls palpables, un bon temps de remplissage capillaire, un état mental normal et un débit urinaire suffisant.
- Ne présenter aucun signe d’œdème ni de thrombose veineuse profonde (TVP).
- Comprendre les changements anatomiques et sexuels liés à la chirurgie.
- Communiquer avec son partenaire au sujet de ses inquiétudes concernant son corps, sa sexualité et son rôle relationnel.
- Explorer et identifier des moyens satisfaisants et sécuritaires d’exprimer sa sexualité.
- Retrouver une activité intestinale normale (bruits intestinaux présents, péristaltisme actif, rythme d’élimination régulier).
- Comprendre son état de santé et reconnaître les complications possibles.
- Faire le lien entre les signes et symptômes postopératoires et les actions nécessaires pour les gérer.
- Connaître ses besoins thérapeutiques et participer activement à son plan de soins.
VI. Interventions infirmières et conduite à tenir après une hystérectomie avec TAHBSO
Voici les actions infirmières essentielles à mettre en place pour accompagner une patiente ayant subi une hystérectomie abdominale totale avec salpingo-ovariectomie bilatérale, afin de favoriser la récupération, prévenir les complications et soutenir son bien-être global.
1. Améliorer la fonction urinaire et l’élimination
- Surveiller les habitudes mictionnelles (fréquence, quantité, jet) et le volume urinaire.
- Palper la vessie pour détecter une distension ou une rétention.
- Observer l’urine (couleur, transparence, odeur) pour repérer des signes d’infection.
- Vérifier la quantité d’urine résiduelle après la miction si nécessaire.
- Favoriser des conditions favorables à la miction : intimité, position normale, eau tiède ou son du robinet, etc.
- Maintenir une bonne hygiène périnéale et des soins adaptés en cas de sonde.
- Catétériser selon les protocoles si la patiente ne peut pas uriner.
2. Favoriser une image corporelle positive et l’estime de soi
- Évaluer ce que la patiente ressent par rapport à son corps, ses changements hormonaux, sa féminité.
- Créer un environnement d’écoute pour que la patiente exprime ses peurs, ses doutes et ses idées fausses.
- Informer clairement sur ce que la chirurgie implique (absence de menstruation, perte de fertilité, ménopause).
- Identifier les ressources de coping positives que la patiente possède déjà.
- Référer, si besoin, à un soutien psychologique ou une counselling spécialisé.
3. Contrôle de l’inflammation postopératoire
- Administrer les médicaments prescrits : anti-inflammatoires, analgésiques selon le protocole.
- Surveiller les signes vitaux (température, rythme cardiaque, tension, etc.) pour repérer une éventuelle infection.
- Appliquer des soins locaux sur la plaie : pansements, nettoyage selon les directives.
- Réaliser des compresses froides, surélever les membres inférieurs pour limiter l’œdème.
- Encourager une hydratation adéquate.
4. Promouvoir une bonne perfusion tissulaire
- Vérifier la tension artérielle, les pouls périphériques, le retour capillaire, la sortie urinaire.
- Observer le drainage vaginal ou du site opératoire (quantité, couleur, odeur) pour détecter un saignement.
- Encourager les exercices des jambes, la mobilisation dès que possible pour prévenir la stase veineuse (position, bas de contention si prescrits).
- Utiliser un spiromètre incitatif et encourager des respirations profondes pour améliorer l’oxygénation.
5. Accompagner les troubles sexuels / fonction sexuelle
- Discuter ouvertement des changements attendus dans la sexualité (perte d’ovaires, modifications anatomiques, lubrification, désir).
- Évaluer les croyances culturelles ou religieuses qui pourraient influencer le vécu de la sexualité.
- Encourager la communication avec le partenaire.
- Proposer des alternatives pour l’intimité (autres formes de contact, positions confortables, lubrifiants, etc.).
- Orienter vers un sexologue ou un conseiller, si nécessaire.
6. Restaurer la fonction intestinale
- Ausculter les bruits intestinaux et surveiller la distension abdominale.
- Favoriser la reprise de la mobilité (lever, marcher) dès que possible.
- Encourager une hydratation suffisante et une alimentation adaptée, riche en fibres quand l’alimentation orale est reprise.
- Si besoin, aider avec des laxatifs ou des émollients selon prescription.
7. Éducation de la patiente et enseignements à domicile
- Expliquer les signes et symptômes qui nécessitent une alerte médicale : fièvre, rougeurs, saignements abondants, écoulements, douleurs inhabituelles. Informer sur les changements que la chirurgie entraîne (ménopause, absence de règles, possibles effets hormonaux).
- Définir les limites d’activité : éviter les efforts, le port de charges lourdes, douche vs bain complet, etc.
- Aborder la reprise des relations sexuelles selon les recommandations médicales.
- Préciser le régime alimentaire favorable à la cicatrisation (protéines, fer, hydratation).
- Si un traitement hormonal substitutif est prescrit, expliquer son rôle, son mode d’administration et ses effets secondaires éventuels.
VII. Conclusion
La prise en charge infirmière après une hystérectomie et une TAHBSO joue un rôle essentiel dans la récupération globale de la patiente. Au-delà de la gestion de la douleur et de la surveillance des complications postopératoires, l’infirmière accompagne également la patiente dans son adaptation physique, émotionnelle et psychologique aux changements liés à l’intervention.
Un plan de soins structuré, incluant l’évaluation, la prévention des infections, la surveillance de la fonction urinaire et intestinale, ainsi que le soutien à l’image corporelle et à la sexualité, permet d’assurer une prise en charge complète et personnalisée.
L’écoute active, l’éducation thérapeutique et la collaboration avec l’équipe pluridisciplinaire renforcent la qualité des soins et favorisent une récupération optimale. En intégrant à la fois les dimensions médicales et humaines, l’infirmière aide la patiente à retrouver confort, autonomie et qualité de vie après cette chirurgie majeure.